Knock, knock, Knock on the doctor 's door
La grande inquisitrice Paganelli piétinant un arrêt de travail pour avortement médicamenteux (allégorie)
Toi, mon nouveau toubib que je n’ai jamais rencontré, nouvelle dentiste, nouveau rhumatologue, nouvelle endocrino, nouvel hépatologue, nouvelle ceci, nouveau cela, tu ne sais pas à quel point je suis terrifiée avant d’entrer dans ta salle d’attente. Oh, pas de ton diagnostic qu’en général j’ai déjà fait, désolée.
(Oui je sais c’est mal, je ne dois pas savoir avant toi, je dois venir en couinant et toi m’assener la vérité.)
Non, j’ai peur de toi. De ce que tu vas me sortir comme énormité, comme saloperie, comme remarque déplacée, sur mon rythme de vie, mon poids, ma sexualité, mon régime alimentaire, mes mauvaises habitudes. Je crève de trouille bleue que tu me fasses mal et que tu trouves ça normal, me traitant plus ou moins de douillette au passage.
Chaque fois que j’entre dans ta putain de nouvelle salle d’attente, chaque fois, même si c’est pour quelque chose d’aussi mineur que changer de lunettes, je suis terrorisée par ce que tu vas me balancer comme jugement de valeur pourri confondu avec un traitement, tu vois.
Avant même que tu ouvres la bouche, je m’apprête à me défendre. Je me prépare moralement à une bataille. Je me gendarme, j’enfile mon armure déjà au moment de prendre rendez-vous (parce que vois-tu même ta secrétaire risque d’être dans ce mood). Je ne te connais pas, mais j’en ai rencontré tant d’autres de ta cohorte, inconscients ou délibérés, qui m’ont traitée comme une patiente, c'est-à-dire quelque chose de moins qu’humain, mineur, toujours susceptible de mentir ou d’en rajouter.
Si bien que de tes quelques collègues qui se montrèrent humains, attentifs, délicats, empathiques ou même simplement courtois, eh bien je me souviens de leurs noms à tous, sur trente-cinq ans.
Depuis hier, je vois tourner sur internet les remarques d’une des mandarines de la gynécologie. Ce mépris, cette bassesse, cette morgue, cette certitude hautaine. Je ne connais pas la dame, mais je l’ai rencontrée cent fois dans ma vie adulte. C’est à cause d’elle et de ses pairs que je meurs d’anxiété en venant chez toi, cher nouveau docteur es quelque chose.
Je viens pour être soignée et j’ai plus de crainte du soignant que de la maladie.
Dis ?
Tu trouves ça normal ?